
La vie des autres, celle qui nous attire tant, qui semble infiniment plus dense, plus riche, plus parfumée que la nôtre, c’est elle qui nous pousse à bout, qui nous fait sortir de nos gonds.
Fouiller la vie des autres, l’épier, la scruter, la fouir, c’est simplement mieux s’imprégner des manies des autres, de leurs envies, leurs actes, leurs pensées, leurs habitudes et aussi leurs poses, leurs mimiques. Fouiller la vie des autres, c’est une façon de trouver quelques réponses au problème de tout le monde « Qu’est-ce qu’être humain ? ». Au fond, vivre, comment on fait ?
Rapidement, c’est la question « qui suis-je ? » qui s’impose. La comparaison systématique, la dévalorisation, l’interprétation de faits et gestes pour justifier nos pensées trop fertiles, souvent infondées. Et suivent « Suis-je normal ? » ou encore « Qu’ai-je de plus ? ». Jusqu’au moment où fouiller devient viscéral, incontrôlable et jouissif, car on cherche quelque chose que l’on ignore encore.
« Est-on honnête avec moi ? », « Me ment-on ? », « Que me cache-t-on ? », finissent par avoir raison de notre raison. C’est la pulsion ultime : l’adrénaline monte, le coeur s’affole, l’esprit s’emballe et tisse des histoires insensées.
« J’en étais sûr. », « Je le savais. », flottent en arrière plan. On cherche autant un prétexte pour avoir cherché qu’à se prouver à soi qu’on a raison. Souvent, c’est le dépit, la tristesse, la colère ou le dégoût, qui finissent par nous faire lâcher la souris, dans cette filature 2.0. Et, doucement, le sentiment amer d’une défaite dont on est le seul responsable, dans notre bataille contre notre propre volonté, pire, notre estime de nous-même. Ça n’a servi à rien, on le savait, on regrette, mais c’est trop tard, le mal est fait.