Je le savais que ce chocolat était de trop.
Mais Pâques oblige, il y en avait partout. Et vous aussi vous connaissez cette sensation délicieuse, que cela soit du chocolat ou un plat en sauce savoureux : sa seule vue vous fait monter la salive en bouche, s’éveiller votre nez, s’agiter vos doigts. Vous sentez déjà le parfum, appréciez la texture avant même de la toucher, goûtez sans avoir croqué, les souvenirs savoureux des expériences passées plus réels que jamais.
Et puis vous y êtes. Bouchée après bouchée, vous redécouvrez l’extase des sensations familières : celle du sucre doux en bouche, du chocolat tiède qui reste sur vos doigts, que vous ne voulez pas gaspiller, alors que vous léchez consciencieusement comme lorsque vous aviez 6 ans, l’humidité de votre salive que vous essuyez discrètement sur le côté de votre pantalon, comme un enfant qui pense devenir invisible en fermant les yeux.
C’est fini, déjà ! Votre langue cherche encore quelques résidus, parcourt les dents, explore les gencives, les lèvres, mais vous devez vous rendre à l’évidence : à part en prendre un autre, ces douces émotions sont derrière vous.
Alors subitement, comme un réflexe, un spasme, vous avancez la main, prêt à tout, prêt à saisir n’importe quoi qui puisse combler ce vide, ce manque. Votre corps tout entier se tend vers la petite boîte dorée, ce coffre-fort tentateur dont la mesure est la seule clé. Frénétiquement, vous essayez de garder un semblant de raison, vous pesez lamentablement le pour et le contre mais c’est plus fort que vous, votre corps ne réagit plus, il agit, simplement, comme un automate, soumis au besoin de satisfaire ce désir impérieux.
Vous avez donc avalé, en ne le mâchant presque pas, votre 25e chocolat de Pâques. Puis vomi.
Je vous l’avais bien dit.
(Oui, ça marche aussi avec la vodka.)