Lille, 7 novembre 2015 – Tripostal
L’homme n’a pas fini de s’interroger sur la modernisation et la façon dont il veut accompagner le progrès. Renaissance, un ensemble de manifestations, événements, expos, concerts, expériences sonores et visuelles, questionne l’époque dynamique dans laquelle nous vivons : d’une vitalité nouvelle, le XXIe siècle semble en effet faire la part belle aux échanges artistiques, technologiques et intellectuels tout en vivant de grandes métamorphoses. 5 villes effervescentes sont mises à l’honneur et leurs artistes permettent d’explorer différentes facettes de ce monde agité.
L’exposition Séoul, vite, vite ! présentée au Tripostal, gravite autour de l’intensité artistique des plasticiens de la dense métropole, des quartiers de Gangnam à celui de Samcheong-dong, représentatifs de l’énergie nouvelle qui habite les Coréens. On entre notamment par une salle aux airs de brocante où se côtoient une foule d’objets aux tons criardes, ordonnés par taille ou soigneusement alignés. Au mur, des mitraillettes roses, sur des étagères, des choux en plastique. Je pense aux multiples sollicitations et stimulations, visuelles ou auditives, qui caractérisent notre quotidien. J’ai envie de fermer les yeux, ou de tout voir en même temps, c’est le mal du siècle : tout est là, à notre portée, mais nous ne savons pas par où commencer, ni comment appréhender cette source infinie d’inspiration et d’informations. Alors nous choisissons l’immobilisme, le découragement, nous préférons fermer les yeux.
Plus loin, de curieux êtres mécaniques s’animent dans la pénombre : la technologie a permis de donner vie au non-vivant, et nous restons facilement plusieurs minutes à attendre que ces grands tentacules d’acier s’articulent doucement. Les nageoires argentées luisent autour des axes et des rouages lubrifiées. Il n’y a aucun bruit, sinon celui des petits moteurs de chaque machine, comme autant de cœurs futuristes.
En haut, un coin DVD-bang permet de tester cette pratique répandue à Séoul. Comme des voyeurs tolérés, nous nous installons dans les grands canapés en face d’un écran. Et nous tirons un rideau à défaut de fermer la porte de la pièce (bang en coréen). Des vies défilent, des gens, des mouvements, et je m’accroche à celui d’un ballon rouge pris au piège dans les herbes au bord du fleuve Han. Je ne peux m’empêcher de penser au Ballon rouge d’Albert Lamorisse.
L’installation de miroirs de l’artiste Lee Bul sur toute la surface d’une salle et en petit labyrinthe nous fascine et nous inquiète. Notre reflet est partout, nous apparaissons sous tous les angles, impossible de se cacher. L’anxiété de paraître en conflit avec celle d’être ? L’omniprésence de l’image ? Notre image qui nous échappe et ne nous appartient plus ?
La Corée du Sud cherche à se distinguer de la Chine en intégrant une dimension écologique à ces grands changements et Jungki Beak rend subtilement compte de cette préoccupation : il propose une série de photographies imprimées sur du papier de tournesol, utilisé par les biologistes pour révéler l’acidité d’un liquide. Son encre ? L’eau du fleuve Han. Une belle façon de dénoncer l’impact de l’homme et de ses activités sur son environnement.