Ils en ont traversé, des épreuves. Essuyé des tempêtes. Et, pour avoir été aux premières loges, j’ai eu un aperçu de toute la violence, tout le dégoût et la douleur que ça a représenté. Mais avec une patience exemplaire et une bienveillance infinie, ils ont su se servir de ces cicatrices pour mieux vivre ensemble et s’aimer de façon plus juste. Aujourd’hui, mes parents sont un des couples les plus épanouis et équilibrés que je connaisse. Je connais leurs défauts par cœur et je sais leurs limites. Je suis d’autant plus fascinée que leur couple a évolué sans arrêt depuis mon enfance. J’adore les observer, comprendre leurs mécanismes, tirer une leçon d’une interaction… La première grande leçon qu’ils me donnent à chaque rencontre : l’acceptation. Totale. Complète. Pour qui ils sont. Pas d’amertume, pas d’aigreur sur leur identité ni sur leurs comportements respectifs.
L’acceptation, comme première grande loi d’Amour
Combien de couples se piquent, s’agacent, se rabrouent, s’ignorent, se parlent comme des chiens, alors qu’ils ont parcouru tant de chemin ensemble ? Combien d’adultes décident de faire un enfant pour se rassurer sur leur engagement, car ils sentent que la flamme est encore vive, mais ne savent plus se parler, ni s’aimer ? Combien souhaiteraient sauver leur couple mais le temps les a éloignés, et le quotidien rendus étrangers ?
Je suis blessée de voir ces vieux amants manquer de considération l’un pour l’autre. De voir la patience laisser la place au mépris. Triste de constater que c’est l’issue partagée par la plupart des couples qui traversent les années. Inquiète, aussi, car j’ai bon espoir de réussir le même exploit que mes parents, mais je me rends compte à quel point la vie de tous les jours est la plus grande épreuve des relations amoureuses. Mes parents ont eu une histoire saine. Avec des très hauts, des très bas, des remises en question, des redéfinitions de leur engagement, des modifications, des enfers et des paradis. C’est une aventure sincère, solide, que je n’idéalise pas plus que j’idéalise mes parents. J’ai conscience de leurs failles mais j’admire la façon qu’ils ont eu de conduire leur histoire.
Je n’ai pas la prétention de savoir ce qui est juste. Je n’ai eu que peu de relations longues, et je n’avais encore jamais vécu avec mes amoureux. Mais depuis 2016, j’ai pris un recul vertigineux sur le fonctionnement de l’amour, des amants et des couples qui m’entouraient. J’ai observé, questionné, expérimenté, et cru comprendre que quelques ingrédients, loin de garantir un amour sans faille jusqu’à la mort, caractérisaient néanmoins des interactions humaines heureuses, fertiles, et apaisées dans le temps. Le premier, c’est l’acceptation.
Acceptez-vous.
Acceptez-vous. Vous-même, et entre vous. Le couple c’est le lieu où vous devriez vous entraîner à être vous-même, pour une relation authentique et nourrissante. Aussi pour ne rien reprocher à votre partenaire plus tard… « Je n’ai jamais pu… ! », « Tu ne m’as jamais laissé… ! ». Faux. VOUS ne vous êtes jamais autorisé à – . Si le travail de la connaissance et de l’expression de soi est une autre histoire, tout ce que vous n’acceptez pas à propos de vous-même sera projeté sur votre partenaire. Quand vous ne chercherez pas à être réparé, sauvé par votre partenaire, vous lui reprocherez d’être tel qu’il n’est pas. Quelle absurdité.
Cessez de vouloir qu’il soit autrement que comme il est. Acceptez pleinement ses habitudes, ses gestes, ses manies. RIEN n’est fondamental, sinon le respect et l’amour. Les restes sont des accommodations pour que le quotidien soit moins difficile. Si les épreuves sont trop grandes pour vous, alors partez. Mais ne faites pas payer à votre partenaire le travail que vous n’avez pas terminé sur vous-même. J’ai un exemple très concret.
Mon père a été marqué par son père, un homme très maniaque, parfois violent, adepte de la manipulation et qui manquait de maturité. Il a appris à manger sans faire une seule miette, à se laver souvent les mains, à se taire et à fermer systématiquement les portes en imaginant que tout le monde devait faire pareil. Vous devinez la suite. Installé avec ma mère, heureux père de trois merveilleux enfants (surtout moi), quelle n’a pas été sa surprise quand il s’est rendu compte que les enfants font des miettes, rangent rarement leur assiette dans le lave-vaisselle et sont généralement bruyants. J’ai des souvenirs nets de nos crises familiales autour d’une table mal nettoyée, de tel ou tel objet qui n’avait pas été bien rangé, etc. Heureusement, le temps a passé et nous étions une tribu solide avec beaucoup d’amour dans laquelle nous discutions longuement à chaque repas. Ma patiente mère a toujours (dans son ensemble) accepté mon père avec cette facette extrême, ce qui a permis l’ouverture d’un dialogue et le changement fascinant de ce dernier au fil des années. Aujourd’hui, mon père ne tique plus sur un mot, un comportement, et même si je le vois prendre note de ces détails qui déclenchaient des tempêtes, il en rit, et ne passe pas l’éponge après chaque repas.
Plutôt qu’entrer dans le jugement, l’un et l’autre se sont retrouvés sur un terrain d’ouverture bienveillante. Je n’ai aucun souvenir de les avoir entendu se parler avec mépris, les désaccords étaient des échanges animés mais toujours avec respect. Ils ont su s’accepter dans toutes leurs facettes, même celles qui pouvaient être jugées moins « aimables », simplement parce qu’ils se respectaient et souhaitaient réussir ce projet commun du couple. Personne n’avait raison ni tort. Ils ont débattu des meilleurs comportements, des meilleures attitudes à adopter pour nous, pour eux, en considérant leurs deux points vue avec équanimité.
Aimer sans condition
On peut avoir des projets. On peut souhaiter aller dans telle ou telle direction, pour qu’une situation corresponde plus à nos aspirations. Mais on ne peut souhaiter le changement immédiat de ce qui est présent, ici et maintenant. Toute action n’est possible que si l’on a pleinement accepté ce qui est là. Ce qui nous caractérise nous, notre partenaire, et notre couple à cet instant. Sans résistance, sans retenue, sans condition. Pour créer un espace où nous sommes vus, compris et aimés pas pour ce que l’on aimerait que chacun soit, mais pour ce que nous sommes. C’est là, que le changement peut se faire. Pas avant. C’est un effet secondaire de l’amour inconditionnel qu’on se porte.

L’acceptation, un exercice pourtant simple à pratiquer au quotidien ! Imaginez que vous êtes en mer, et que la seule chose que vous pouvez maîtriser, c’est votre bateau. Rien ne sert de s’agacer du vent, de la houle, de la météo. De votre compagnon d’infortune. Mieux vaut s’entendre pour traverser la tempête. En pratique, ça veut dire quoi ?
- Mettre en perspective ce qui vous agace avec la big picture : non, mâcher en faisant du bruit n’est pas un motif de divorce. Même si croquer dans un carreau de chocolat la bouche ouverte, oui ça fait sauter des petits éclats qui risquent de fondre sur les vêtements (coucou maman).
- Se souvenir que son partenaire est… un être humain. DINGUE. Pas un fantasme, pas un Être de lumière, pas une projection de vos espoirs les plus fous. Tiens, regardez-vous dans un miroir : à quel point êtes-vous exigeant avec vous-même ?
- Trouver de la tendresse à connaître les manies et habitudes de votre aimé. Oui, il aime fermer certains volets et pas d’autres, sans logique apparente, et alors ? Pourquoi cherchez-vous l’efficacité, la performance, la logique à tout prix ?
- Se rappeler que ses comportements le caractérisent lui, et pas vous. Il est encore un être vivant distinct, souvenez-vous-en. Votre partenaire a le droit de faire des blagues lourdes, vous n’avez pas à vous sentir concerné. Regardez plutôt pourquoi vous vous sentez confondu avec lui/elle ? Pourquoi avez-vous peur d’être associé à lui / jugé ? Avez-vous quelque chose à prouver ? À qui ?
- Cessez de vous dire qu’une fois que ceci ou cela sera fait, sera dit, tout ira mieux, le bonheur s’installera pour de bon. La vie, c’est maintenant. Acceptez la simplicité et la grâce au quotidien. Le bonheur est là, le voyez-vous ?
The way of love is the way of no-expectation.
Love exists only when there is total acceptance and no desire to change anything
Osho❤️