Violence

Ce soir, j’ai redécouvert qu’une des femmes de ma vie, de mon proche entourage, avait été touchée par un connard quand elle avait 8 ans.

Je l’ai su il y a plusieurs années, mais je n’ai pas pu l’intégrer. Et ce soir, ça me revient brutalement. Un homme adulte en uniforme l’avait attirée dans un terrain vague pour poser ses sales mains sur son corps d’enfant.

Disparition - Andrei Lazarev
Disparition – Andrei Lazarev

Le salaud qui t’a violée.

C’est étrange d’écrire ça, parce que si une part de moi souhaiterait lui faire manger ses couilles et lui cramer la gueule, une part de moi éprouve une compassion infinie pour les horreurs qu’il a dû lui-même subir pour en arriver là. Le résultat de la violence du monde.

Et toute la colère que j’éprouve ce soir est à la hauteur de la violence du monde. Comment a-t-on pu laisser faire, pour que l’esprit des hommes deviennent si blessé, si perverti, qu’il en vienne à défaillir là où précisément il devrait exceller ? Protéger la vie, les vulnérables, mettre sa force au service des faiblesses, mettre son uniforme au service de tous.

Pas pour poser ses doigts immondes sur la vulve et dans le sexe d’une enfant.

Comment se fait-il, aujourd’hui, que la sexualité continue d’être une arme ? Rhétorique traître. C’est très simple, en réalité. D’une simplicité perverse et sournoise qui me fout la gerbe.

C’est à cause de connards comme nos amis un peu lourds, qui font des blagues salaces sur les gens, leur corps et le sexe. Je sais, je m’attaque à l’individu et non à ses actes. Laissez-moi le luxe d’user de communication violente, un peu. Parce qu’à chaque fois qu’un abruti utilise son sexe comme punition, qu’un de nos proches fait rire la galerie avec des histoires sordides sur comment-j’ai-pris-de-la-coke-sur-le-cul-de-cette-meuf ou quel-petit-pd-il-méritait-que-ça, eh bien c’est toute l’humanité qui régresse. Et qui viole.

L’effet papillon

Théoriquement, le responsable c’est celui qui a causé du mal à celui qui a causé du mal à celui qui… Mais en pratique, c’est nous. Nous tous. Les responsables des violences sexuelles, ce sont nos mots du quotidien, les absurdités qu’on balance pour faire rire à l’apéro, le vocabulaire sexiste, les représentations cinématographiques dégradantes qui montrent des relations hommes/femmes complètement à côté de la plaque, loin de ce à quoi elles pourraient ressembler si on utilisait son cerveau.

Nature Yoni - chenille

Les responsables, ce sont les nombreuses images qu’on nous impose, de scènes, de comportements, de mots, de rapports, qui sont loin, mais très loin, de relations humaines équilibrées et harmonieuses. Le porno, mille fois le porno, et même certains pornos « conscients », qui continuent de véhiculer une grande partie de ces tristes conditionnements sociétaux. Les responsables, ce sont les médias et tous ceux qui les financent, qui y travaillent et qui les consomment.

Les responsables des violences sexuelles, ce sont ceux qui rient, à table, quand quelqu’un fait une blague sexiste, même si c’est-pas-sérieux-c’est-pour-rigoler, mais ce sont aussi ceux qui se taisent et préfèrent passer pour des gens qui n’ont pas d’humour plutôt que passer pour des rabats-joies.

Toi, mon ami beauf

Alors tu n’es peut-être pas bien méchant, dans le fond. Tu es même plutôt gentil, un peu lourd, mais gentil. Tu as intégré le cercle de mes amis, parce que tu étais l’ami d’ami, le gars généreux, qui n’a pas sa langue dans sa poche (« plutôt sur des vulves ! » #lolilol #lourdeur). Tu n’es même pas bête, tu es blessé, je le sais. On t’a brisé il y a longtemps, une histoire de papa un peu sévère, une maman alcoolique, bref. Tu es comme 1 million d’autres hommes sur cette Terre, accro au cul, mal dans ta peau et dépressif. Alors, biberonné aux messages d’Hollywood, tu joues la comédie et tu abuses des gens quand tu es saoul. Et ça, c’est pas drôle.

Ani Buero - violences sexuelles
Ani Buero – violences sexuelles

Mon amie-à-oeillères, toi, aussi, depuis longtemps je sais que nos chemins divergent, mais la vie, l’attachement que l’on a pour les souvenirs en commun, ta douceur, ton attention, tu fais partie de mes cercles même si ton discours sur ton propre corps me révolte. Même si tu éprouves du dégoût pour celui des autres, que tu critiques sans arrêt les formes, les modes de vie et fais l’hypocrite quand on te parle vrai. Scroller copieusement sur Instagram pour juger et te moquer, ça fait partie de toi et tu n’es pas méchante, je te connais. Mais tu es comme la cellule infectée d’un corps malade. Je ne voudrais en aucun cas que mes enfants te côtoient, parce que je les veux libres.

Parlez et développez.

Ce sont ces personnes, chères ou non, proches ou non, qui font partie de notre vie à tous, qui permettent encore à des ordures de croire qu’il est OK de profiter d’une enfant sur un terrain vague. Ce sont des détails monstrueux qui s’accumulent dans un coin, et viennent composer une immense montagne de déchets existentiels, émotionnels, piles d’instants gâchés et de vies traumatisées.

Alors s’il vous plaît, contredisez. Parlez. Renchérissez, débattez, devenez le rabat-joie des soirées, soyez expert en douches froides (bain dérivatif du cerveau, à tester ?). Demandez-vous si vous êtes vous-même un ami-beauf ou une copine-à-oeillères, par pitié entamez une démarche de développement personnel, posez-vous des questions, et soyez vigilant aux mots que vous utilisez, toujours.

Ce sont ces laisser-dire qui mènent à de tristes laisser-faire, et scellent d’une chape de plomb les voix des victimes de violences sexuelles.

Violences sexuelles - Infographie Ipsos
Violences sexuelles – Infographie Ipsos

 

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